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HUMAIN, TROP HUMAIN


moitié raisonnables, facétieux, exagérés, sots, qui ne sont là parfois que pour adoucir le pathétique dè la situation par des saillies, par du bavardage, et couvrir de leurs cris le glas trop lourd, trop solennel des grands événements ; autrefois au service des princes et des nobles, maintenant au service des partis (de même que dans l’esprit de parti et la passion de parti survit maintenant encore une bonne part de la vieille obséquiosité dans les rapports de peuple à princes). Mais toute la classe des littérateurs modernes est fort voisine des feuilletonistes ; ce sont les « fous de la civilisation moderne », qu’on juge avec plus d’indulgence, si on ne les prend pas pour entièrement responsables. Considérer l’état d’écrivain comme une profession devrait, en bonne justice, passer pour un genre de démence.

195.

Renouvelé des Grecs. — Ce qui gêne beaucoup présentement la marche de la science est que tous les mots, par une exagération de sentiment qui dure depuis cent années, sont devenus bouffis et ampoulés. Le degré supérieur de culture qui se tient sous la domination (sinon même sous la tyrannie) de la science a un besoin absolu de bien dégriser le sentiment et de concentrer fortement tous les mots ; en quoi les Grecs du temps de