pour que nous n’en soyons pas déchirés. Sans les
erreurs qui résident dans les données de la morale,
l’homme serait resté animal. Mais de cette façon
il s’est pris pour quelque chose de supérieur et s’est
imposé des lois plus sévères. Il a par là de la haine
contre les degrés restés plus voisins de l’animalité ;
c’est par cette raison qu’il faut expliquer l’antique
mépris de l’esclave, comme de l’être qui n’est pas
encore homme, comme d’une chose.
Le caractère immuable. — Que le caractère soit immuable, ce n’est pas une vérité au sens strict ; en réalité, cette proposition favorite signifie seulement que, pendant la courte existence d’un homme, les nouveaux motifs qui agissent sur lui ne peuvent pas d’ordinaire marquer assez profondément pour détruire les linéaments imprimés de milliers d’années. Mais si l’on se figurait un homme de quatre-vingt mille ans, on aurait chez lui un caractère absolument muable : si bien qu’une foule d’individus divers prendraient de lui tour à tour leur développement. La brièveté de la vie humaine conduit à maintes affirmations erronées sur les qualités de l’homme.
L’ordre des biens et la morale. — La hiérar-