Page:Nietzsche - La Volonté de puissance, t. 1, 1903.djvu/46

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a conçu ce tout, afin de pouvoir donner créance à sa propre valeur.

Le nihilisme, en tant que condition psychologique, possède encore une troisième et dernière forme. Étant donnés ces deux jugements : à savoir que par le devenir rien ne doit être réalisé, et que le devenir n’est pas régi par une grande unité, où l’individu peut entièrement se perdre comme dans un élément d’une valeur supérieure : il reste le subterfuge de condamner ce monde du devenir tout entier, parce qu’il est illusion, et d’inventer un monde qui se trouve au-delà de celui-ci, un monde qui sera le monde-vérité. Mais dès que l’homme commence à s’apercevoir que ce monde n’a été édifié que pour répondre à des nécessités psychologiques et qu’il n’y a absolument aucun droit, une forme suprême du nihilisme commence à naître, une forme qui embrasse la négation d’un monde métaphysique, — qui s’interdit la croyance en un monde-vérité. En se plaçant à ce point de vue, on admet la réalité du devenir comme seule réalité, on se défend toute espèce de chemin détourné qui mène à l’au-delà et à de fausses divinités — mais on ne supporte pas ce monde-ci, bien que l’on ne veuille pas le nier…

— Qu’est-il arrivé en somme  ? Le sentiment de la non-valeur était réalisé, mais on comprit que l’on ne pouvait interpréter le caractère général de l’existence ni par l’idée du " but ", ni par l’idée de "I’