Page:Nietzsche - La Volonté de puissance, t. 2.djvu/249

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bonne école en temps voulu. Voilà un homme qui ne se connaît pas; il traverse la vie sans avoir appris à marcher; le relâchement des muscles se laisse deviner à chaque pas. Il se peut quelquefois que la vie soit assez pitoyable, pour faire rattraper à dure école le temps perdu: ce sera peut-être une longue maladie qui, pendant des années, nécessitera une extrême force de volonté, avec le contentement de joies minimes; ou bien une misère subite qui compromet, avec l'homme, la femme et les enfants, et force à une activité qui rend l'énergie aux fibres relâchées et fait regagner son opiniâtreté à la volonté de vivre... Une discipline sévère restera ce qu'il y a de plus désirable, une discipline au bon moment, c'est-à-dire l'âge où l'on est fier de voir exiger beaucoup de soi-même. Car c'est là ce qui distingue la dure école, en tant que bonne école, de toutes les autres; il faut exiger beaucoup; il faut exiger avec sévérité; la valeur, la perfection, même dans la valeur, sont exigées comme choses normales; il faut que la louange soit rare et que l'indulgence fasse défaut; il faut que le blâme soit sévère, restreint au fait, sans égard au talent, à l'origine. Une pareille école est nécessaire à tous les points de vue: pour le corps tout comme pour l'esprit; il serait néfaste de vouloir séparer ici ! La même discipline rend capable le militaire et le savant, et, si l'on y regarde de plus près, il n'existe pas de bon savant, qui n'ait en lui les instincts du