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Page:Ninous - L Empoisonneuse.pdf/440

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confier à mon fils Lucien de Sauvetat ma fille bien-aimée, Marianne de Sauvetat. Des raisons de prudence m’ont empêché de reconnaître devant les autorités de mon pays cette enfant de mon cœur et de mon sang, mais je désire que mon fils lui donne mon nom, et la part qui lui revient de ma fortune personnelle. »

Au-dessous, le timbre de la subdivision, la date et la signature.

Marianne fit passer la pièce à Jacques, qui la laissa examiner par chacun.

Nul ne douta de son authenticité.

— Ceci, dit-elle en montrant le dossier le plus volumineux, est le récit détaillé de ma naissance et de la mort de ma mère ; le général de Sauvetat l’a tout entier écrit de sa main.

Pendant que Jacques en baisait pieusement la signature, Marianne ouvrit le papier le plus blanc ; mais à la vue des caractères dont il était couvert, de grosses larmes inondèrent ses joues, on aurait dit que sa voix brisée ne pouvait plus articuler ce que ses yeux déchiffraient :

« Moi, Lucien de Sauvetat, » affirmaient ces quelques lignes.

« Malade de corps, mais parfaitement sain d’esprit, je déclare mourir empoisonné par ma femme, Blanche d’Auvray. La nuit dernière je l’ai surprise versant dans la potion que je devais prendre de l’extrait de Saturne. Je lui ai arraché la fiole à moitié pleine des mains, et je la joins à cet écrit que je vais déposer dans un endroit secret connu seulement de ma sœur, Marianne de Sauvetat.

« Je n’ai pas voulu essayer de me sauver en prenant un remède quelconque ; je l’aurais peut-être pu ; mais je n’ai osé confier à aucun médecin sur terre l’horrible