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MÉTAMORPHOSES DE L’ESPACE ET DU TEMPS.

est asymptote à la perfection, que d’entendre dire quelquefois : « Dis-moi quel temple tu fréquentes et je te dirai si ta géométrie est juste » ? La Vérité n’a pas besoin d’état-civil. Passons.

Toutes nos notions, toute la science, toute la vie pratique elle-même sont fondées sur la représentation que nous nous faisons des aspects successifs des choses. Notre esprit, aidé par nos sens, classe avant tout celles-ci dans le temps et dans l’espace, qui sont les deux cadres où nous fixons d’abord ce qui nous est sensible dans le monde extérieur. Écrivons-nous une lettre : nous mettons en suscription le lieu et la date. Ouvrons-nous un journal : ce sont ces indications qui y précèdent toutes les dépêches. Il en est de même en tout et pour tout. Le temps et l’espace, la situation des choses et leur époque apparaissent ainsi comme les piliers jumeaux de toute connaissance, les deux colonnes sur lesquelles repose l’édifice de l’entendement humain.

Leconte de Lisle l’a bien senti, lorsque avec sa profonde et philosophique intelligence il écrivait, s’adressant pathétiquement à la divine mort :

Délivre-nous du temps, du nombre et de l’espace
Et rends-nous le repos que la vie a troublé.

Le nombre n’est ici que pour définir quantitativement le temps et l’espace, et Leconte de Lisle a bien exprimé,