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FRÉDERIC DE HARDENBERG,

fluence sur cette renaissance. Parmi les métaphysiciens j’étais devenu métaphysicien. Vons trouverez aussi dans ce roman des poésies de ma façon, je me plais beaucoup dans le roman proprement dit — Ce roman me sera utile sous beaucoup de rapports ; ma tête est toute remplie de plans de romans et de comédies. Si j’ai le plaisir de te voir bientôt, je t’apporterai comme épreuve un conte, et un conte bleu (Mährchen) de mon roman. » — Au commencement du printemps il vint plusieurs fois chez nous, et nous communiqua le premier volume tel qu’il a été publié. Ayant quitté jéna en 1800, j’allai voir mon ami dans sa maison paternelle à Weissenfels. Je le trouvai bien portant et de bonne humeur ; sa mine ne me parut pas avoir changé, quoique les siens fussent un peu inquiets, croyant s’apercevoir qu’il devenait de jour en jour plus pâle et plus maigre. Sa diète était encore plus sévère qu’autrefois ; il ne buvait que peu ou point de vin, ne mangeant presque pas de viande, et ne vivait que de laitage et de légumes. Quoique nous nous promenassions tous les jours, soit à pied, soit à cheval, je ne pus m’apercevoir qu’il eut la poitrine faible, ou que sa respiration devînt plus courte en montant rapidement une colline, ou après avoir fait une marche fatigante. Je combattis donc sa manière de se nourrir, taxant d’erreur et de pusillanimité son abstinence du vin et de toute nourriture fortifiante. Il était enthousiasmé des plans de son bonheur futur ; son habitation était déjà prête, car il comptait se marier au mois d’Août prochain. Il s’entretenait volontiers avec moi de la dernière main qu’il était sur le point de mettre à son Henri d’Ofterdingen et à plusieurs de ses autres ouvrages. L’amour et une activité littéraire peu commune paraissaient comme doubler son existence. Quand je pris congé de lui, il m’était absolument impossible de prévoir que je ne le reverrais plus. Au mois d’Août, étant sur le point de partir pour Freyberg, où il comptait célébrer