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lutte signifie combat entre dissemblables, et, en sociologie, combat entre semblables.

Cette contradiction doit fausser, on le comprend, les comparaisons qu’on établit si superficiellement entre les faits zoologiques et les faits sociaux. Il est temps de reconnaître dans quelle profonde erreur plongent les darwiniens ; il est temps pour eux d’étudier les faits naturels d’une façon précise et exacte. Les généralisations hâtives, les à peu près, les vagues analogies ne suffisent pas ; il faut se tenir constamment sur le terrain des réalités positives.

Pourquoi les loups ne se mangent-ils pas entre eux ? Mais tout simplement parce que, si les loups s’étaient constamment jetés sur leurs semblables pour les dévorer, l’espèce loup aurait disparu depuis longtemps. Assurément, nous ne savons pas comment l’hérédité fixe les instincts, mais nous constatons que les instincts héréditaires existent. L’espèce humaine ayant été d’abord une espèce animale, comme les autres, a dû subir la loi commune. Lorsque l’homme s’est dégagé d’une forme antérieure, il possédait nécessairement l’instinct héréditaire qui le poussait à ne pas combattre ses semblables. Nous voyons cet instinct, non seulement chez les herbivores et les fructivores, qui ne peuvent pas se manger les uns les autres, mais encore chez les carnivores. Cet instinct a dû exister chez l’homme, qui a commencé par être fructivore. Mais au fur et à mesure que l’intelligence de l’homme s’est développée, l’instinct s’est atrophié, parce qu’il devenait moins utile. Aussi voyons-nous, de nos jours, chez les animaux des instincts très précieux que nous ne possédons, malheureusement, pas ou que nous ne possédons, malheureusement, plus. Qui sait s’il n’y a pas eu une époque où le premier homme qui a osé attaquer son semblable a commis un acte novateur de la plus grande hardiesse ? Et cet acte n’a été possible que par l’affranchissement de l’esprit humain, par la révolte vic-