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LE ROMAN DE L'HOMME

contre le père de ce fils, dont l’abandon où il l’avait reléguée, après trois ans de mariage, ruinait ses plus belles espérances.

Le portrait de Mathieu que nous fait Françoise Loranger est complet ; c’est avec beaucoup d’habileté aussi qu’elle nous dirige au milieu de la crise qui doit guérir le malade qu’il est. On peut, cependant, lui reprocher de n’avoir pas mis suffisamment en lumière le caractère de Danièle, dont on s’explique mal, à certains moments, la manière d’agir ; rien ne prépare, par exemple, le geste gratuit par lequel elle se donne à un homme que non seulement elle n’aime pas, mais qui l’a toujours ennuyée, contre lequel elle avait plutôt une aversion prononcée et que, de plus, elle jugeait inférieur à elle. Le besoin de se prouver à elle-même sa liberté, sa parfaite égalité avec le sexe mâle ne nous semblent pas une justification suffisante. Cet hors-d’œuvre n’ajoute rien ; il contredit plutôt le personnage qu’il paraît vouloir éclairer.

Mais c’est réellement Robert Élie, avec « La Fin des Songes » et André Langevin, avec « Évadé de la nuit > qui ont introduit la désespérance dans le roman canadien. « Væ soli », pourrait-on écrire en exergue au roman d’Élie, car le grand malheur de Marcel est d’être seul, désespérément seul et