Page:Octave Mirbeau - La 628-E8 - Fasquelle 1907.djvu/116

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

contre l’imbécillité lâche et sournoise des choses, car l’on dirait que les choses elles-mêmes ont de la haine, une haine atroce, une haine humaine, contre ce qui est juste et beau.

Et voilà un sculpteur, deux sculpteurs, dont les intentions ne peuvent être, une minute, suspectées, qui aimèrent Zola, qui l’admirèrent, et qui, parce qu’ils furent impuissants à interpréter le génie d’une œuvre et l’héroïque beauté d’un acte, s’écrient, dans leur langage d’artistes fourvoyés :

— Décidément, la Vérité et Zola ne sont pas d’ensemble.

Je sais bien que le fait, en lui-même, est assez mince, et qu’il ne faut voir dans ces paroles qu’un mauvais calembour, en argot de métier…

Pourtant, ce soir-là, à la suite de ce récit, je rentrai à l’hôtel affreusement triste et découragé. Je passai une nuit fort agitée et fiévreuse. Dans mes cauchemars, je ne voyais partout que des places publiques, des squares, des jardins, où des foules forcenées érigeaient au Mensonge, à la Haine, au Crime, à la Stupidité, des monuments formidables et dérisoires.

Heureusement, le lendemain, Bruxelles me reprenait. Je revis, en sortant, la jolie femme au laurier-rose, plus candide, plus enfant que jamais… Elle ne jouait plus au gros lion avec ses petites filles ; elle jouait au méchant tigre. Et les Bruxellois eurent vite fait de chasser les fantasmes de la nuit, et de m’entraîner, à nouveau, dans la ronde de leur comique.


Sur les ponts De Bruxelles…


Qu’est-ce que je chantais là, mon Dieu ?… À Bruxelles, il n’y a pas de ponts… Ils avaient bien, autrefois,