Page:Octave Mirbeau - La 628-E8 - Fasquelle 1907.djvu/399

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tout à l’heure, une chose encore bien plus curieuse et qui ne s’est jamais vue, je crois, en Allemagne… Aucun de ces spectateurs ne songera à souper, après le théâtre. Ils en ont perdu le boire et le manger… Ils vont rentrer chez eux, en hâte, le corps en feu, et, pleins de l’image de Monna Vanna « nue sous le manteau », ils vont doter la patrie allemande d’un petit Allemand, confectionné selon les meilleures recettes de l’Anthropogénie… Ah ! mon cher, on ne peut savoir à quel point une femme, qui, d’ailleurs, n’est pas du tout « nue sous le manteau », peut augmenter, en un soir, la population d’un grand pays, comme l’Allemagne… Les statisticiens nous le diront, peut-être, un jour…

Et il ajouta :

— Je ne comprends pas du reste que, chez vous comme chez nous, il y ait tant de solennels idiots pour vouloir proscrire du théâtre, du livre, du tableau, les images voluptueuses… Même ce qu’ils appellent la pornographie devrait être respecté, entretenu, protégé, comme une force, comme une vertu nationale, puisqu’elle facilite le rapprochement des sexes… Mais les pires agents de dépopulation, ce sont tous ces sénateurs Bérenger, protecteurs du triste et stérile onanisme…

— Alors, dis-je, vous êtes, vous aussi, pour la repopulation ?

— Moi ? fit von B… vivement. Mais, je m’en fous, complètement, mon cher…



Une soirée au music-hall.


Foule énorme à l’Apollo-Theater, où l’élément militaire domine. On ne voit que des uniformes ; on n’entend que des petits bruits de sabres.