Page:Oeuvres de Louis Racine, T1, 1808.djvu/160

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Quel remède à nos maux, que des ris ou des pleurs !
Qu’ils en cherchent la cause, et guérissent nos cœurs.
Habitant des tombeaux, que t’apprend leur silence ?
" Les atomes erraient dans un espace immense :
Déclinant de leur route ils se sont approchés :
Durs, inégaux, sans peine ils se sont accrochés.
Le hasard a rendu la nature parfaite :
L’œil au-dessous du front se creusa sa retraite :
Les bras au haut du corps se trouvèrent liés :
La terre heureusement se durcit sous nos pieds.
L’univers fut le fruit de ce prompt assemblage :
L’être libre et pensant en fut aussi l’ouvrage."
Par honneur, Hippocrate, ou par pitié du moins,
Va guérir ce rêveur, si digne de tes soins.
C’est à l’eau dont tout sort que Thalès nous ramène ;
L’air seul a tout produit, nous dit Anaximène.
Et l’éternel pleureur assure que le feu
De l’univers naissant mit les ressorts en jeu.
Pyrrhon qui n’a trouvé rien de sûr que son doute,
De peur de s’égarer ne prend aucune route.
Insensible à la vie, insensible à la mort,
Il ne sait quand il veille, il ne sait quand il dort,
Et de son indolence, au milieu d’un orage,
Un stupide animal est en effet l’image.
Orné de sa besace, et fier de son manteau,
Cet orgueilleux n’apprend qu’à rouler un tonneau.
Oui, sa lanterne en main Diogène m’irrite ;
Il cherche un homme, et lui n’est qu’un fou que j’évite.
C’est assez contempler ces astres si parfaits,
Anaxagore : enfin dis-nous qui les a faits.