Page:Oeuvres de Louis Racine, T1, 1808.djvu/205

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Là d’un cubique amas, berceau de la nature,
Sortent trois éléments de diverse figure :
Là ces angles qu’entre eux brise leur frottement,
Quand Dieu, qui dans le plein met tout en mouvement,
Pour la première fois fait tourner la matière,
Se changent en subtile et brillante poussière.
Newton ne la voit pas ; mais il voit, ou croit voir
Dans un vide étendu tous les corps se mouvoir.
Exerçant l’un sur l’autre un mutuel empire,
Par les mêmes liens l’un et l’autre s’attire,
Tandis qu’au même instant et par les mêmes lois
Vers un centre commun tous pèsent à la fois.
Qui peut entre ces corps de grandeur inégale
Décrire les combats de la force centrale ?
L’algèbre avec honneur débrouillant ce chaos,
De ses hardis calculs hérisse son héros.
Vous que de l’univers l’architecte suprême
Eût pu charger du soin de l’éclairer lui-même :
Des travaux qu’avec vous je ne puis partager,
Si j’ose vous distraire, et vous interroger,
Dites-moi quel attrait à la terre rappelle
Ce corps que dans les airs je lance si loin d’elle ;
La pesanteur… déjà ce mot vous trouble tous.
Expliquez-moi du moins ce qui se passe en vous.
Au sortir d’un repas, dans votre sein paisible,
Quel ordre renouvelle un combat invisible ?
Et quel heureux vainqueur a pu si promptement
Chercher, saisir, dompter, broyer cet aliment,
Qui bientôt liqueur douce ira de veine en veine
Se confondre en son cours dans le sang qui l’entraîne ?