Page:Oeuvres de Louis Racine, T1, 1808.djvu/31

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entre eux, et quoiqu'ils ne forment, pour ainsi dire, qu'une même école, ne parlent pas toujours le même langage. Les uns s'expliquent par des termes qui nous semblent plus faciles à concevoir, et nous offrent des images plus sensibles. Les autres s'expliquent par des termes plus abstraits ; mais leur système plus philosophique, et soutenu par un corps savant, est aujourd'hui plus généralement suivi. Je me fais gloire d'y être attaché ; mais il ne m'est pas possible de mettre en vers ces termes philosophiques qui expliquent l'opération de Dieu sur sa créature. Il me suffît d'établir la souveraineté entière de celui qui fait tout en nous et si je la dépeins souvent par des images conformes à ce que les Augustiniens appellent la Délectation victorieuse, je me sers souvent aussi d'expressions qui répondent à ce que les Thomistes appellent la Prémotion physique : ce qui se concilie aisément, puisque s'il est indubitable que Dieu nous conduit par amour, et remplace dans notre cœur par des attraits célestes, les attraits des biens sensuels, il paroît également indubitable que celui qui nous donne l'être, nous donne aussi la manière d'être ; qu'il est le souverain moteur des cœurs, qu'il fait et notre volonté et notre liberté.

Il est vrai que j'admets, comme saint Augustin, une différence des deux états, mais je l'admets à l'exemple de M. Bossuet, que les Thomistes se glorifient d'avoir de leur parti. Et qui ne se glorifieroit pas de penser comme a pensé un évêque qui a été en même temps l'un des plus sublimes génies de la France, et l'une des plus grandes lumières de toute l'Eglise ? Dans son Traité du libre Arbitre, où il explique avec tant de clarté et de précision