Page:Oeuvres de Louis Racine, T1, 1808.djvu/33

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même que je citerai aussi quelquefois le P. Bourdaloue, ce héros des orateurs chrétiens, qui a fait l’admiration de la ville et de la cour, en prêchant l’Evangile dans toute son étendue, et dans fôute sa sévérité. On verra souvent ses principes conformes aux miens, parce que théologiens, philosophes, orateurs et poètes, doivent parler de même, quand ils parlent de la toute-puissance d’un Dieu sur sa créature. Le P. Mallebranche lui-même, quoiqu’opposé au système de la promotion physique, ne peut s’empêcher de reconnoitre dans son Traité de la Nature et de la Grâce, « qu’il n’y a que Dieu qui agisse immédiatement sur nos esprits, et qui produise en eux toutes les modifications dont ils sont capables ; et que l’âme n’est volonté, que par le mouvement que Dieu lui imprime sans cesse. »

Ce fameux ennemi de l’imagination, si souvent abusé par elle, opposoit en même temps aux Thomistes, la comparaison d’une pagode que son maître jette au feu, parce qu’elle n’a pas devant lui baissé la tête, qu’elle ne pouvoit baisser qu’au moyen du cordon que son maître devoit tirer. Cette comparaison n’a aucune justesse. Les Thomistes, ni aucuns bons théologiens, ne disent jamais qu’on soit damné pour avoir manqué de Grâce. On est puni de tel ou tel péché ; or ce n’est pas le défaut de Grâce qui est la cause immédiate du péché : c’est notre volonté déréglée qui nous le fait commettre.

Soyons donc toujours fortement persuadés, et de la puissance de Dieu, et de notre liberté. Ces deux vérités doivent être le fondement de notre vigilance et de notre humilité. Agissons comme pouvant tout, prions comme ne pouvant rien : c’est la conclusion qu’il faut tirer de la