Page:Oeuvres de Walter Scott,Tome II, trad Defauconpret, 1831.djvu/10

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6 HAROLD L’INDOMPTABLE.

suivit pour lui faire honneur. Les bannières flottaient dans les airs ; les moines les précédaient à cheval, et derrière eux venaient des hommes armés de lances. Bientôt le cortège défile dans la vallée ; à la porte de la forteresse était le jeune Harold, fils unique et héritier du comte.

VIII.

Le jeune Harold était déjà redoutable par son audace ; sa force et son caractère irascible. Son aspect était dur et sauvage ; il ne portait ni collier ni bracelet d’or ; et ce jour de fête ne le vit point revêtir un riche vêtement. Sa tête était découverte, et ses sandales délacées ; les boucles de ses noirs cheveux pendaient sur son front, et laissaient seulement entrevoir ses regards menaçans ; sa main était armée d’une massue danoise, dont les pointes étaient souillées d’un sang qui fumait encore. À quelques pas derrière lui on apercevait une louve et ses deux louveteaux qu’il avait tués ce matin même à la chasse. Il ne fit qu’un brusque salut à son père, et aucun à l’évêque.

IX.

— Est-ce bien toi, dit-il, qui te laisses conduire par des prêtres ; est-ce bien toi que cet hypocrite regard et ce front humilié rendent semblable au jeune novice qui médite déjà de violer ses vœux ? Est-ce bien là ce Witikind le Terrible, le fils du roi Eric, l’époux de la fière Gunhilda, qui conquit sa fiancée avec le glaive et la hache ? Es-tu bien encore ce guerrier qui ravit le calice de saint Pierre, et le convertit en bracelets consacrés à Freya et à Thor ? Est-ce bien toi qui, devant l’autel d’Odin, écrasas d’un coup de ton gantelet la tête d’un buffle sauvage ? Tu suivais alors les rites des dieux de la guerre, et tu les honorais par les exploits des braves et des forts. Aujourd’hui, vieillard sans énergie, iras-tu avouer tes crimes à un moine tonsuré, changer ta cuirasse contre la haire, et te condamner toi-même au jeûne et au fouet, comme un vil esclave ? Ou, admis dans un cloître, asile de l’indolence, voudras-tu t’énerver entre un prêtre et une