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CHANT SECOND. 199

dans un amour illégitime, et perd le souvenir de sa belle épouse ; il aime mieux, en se jouant, ravir une fleur sur le sein de sa maîtresse, que d’enlever à un chevalier saxon les honneurs de son cimier ; il aime mieux décorer une noire chevelure des plumes du héron que son gerfaut a immolé, que de faire flotter sur l’autel du Christ les bannières conquises sur les infidèles.

C’est ainsi que de jour en jour sa vie s’écoule sans gloire ; mais celle qui entretient son rêve flatteur voit approcher avec crainte l’heure de son réveil.

III.

Les charmes terrestres des mortelles sont assez puissans pour détourner nos pas des sentiers pénibles de la vertu ; mais les charmes de Guendolen éclipsaient tous ceux des simples mortelles. Sa mère avait su plaire à un génie de la terre qui présidait jadis aux ruses des amans et aux triomphes des belles ; long-temps il avait reçu le culte idolâtre de la jeunesse bretonne, qui l’honorait par des danses et des hymnes sacrés, jusqu’à ce que la croix parût sur le sol d’Albion, et que le feu s’éteignît sur les autels païens.

Ce fut alors que le père de Guendolen maudit la perte de ses droits dans la solitude de Wastdale ; et, léguant à sa fille l’héritage de sa haine, l’instruisit dans l’art de tromper les mortels pour plonger dans la honte et les voluptés les glorieux défenseurs du nom chrétien.

Habile à entretenir de vaines pensées, promettant à tous pour ne rien accorder à aucun, Guendolen berçait d’espérances le jeune homme timide, et traitait avec la même cruauté celui qui était plus hardi et plus pressant. Comme on voit des enfans s’égarer loin de la maison paternelle, pour courir après l’arc-en-ciel ; ses amans renonçaient à l’estime, à la loyauté, à la gloire, pour l’illusion d’un songe.

IV.

Guendolen mit ainsi en usage tous ses artifices pour