Page:Ostwald - L’Évolution d’une science, la chimie, 1909.djvu/267

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placé devant la nature cherche à obtenir un ton déterminé avec les couleurs de sa palette, il ne se dit pas : Je dois prendre pour cela de l’ocre ou de l’outremer et du blanc d’argent, mais son pinceau va droit aux petits tas de couleur correspondants, et il réalise le mélange en pensant peut être à tout autre chose. Il en est de même pour le savant servi par une mémoire particulière, capable de faire des reproductions rapides, car on ne peut guère imaginer qu’un savant réussisse sans cette mémoire spéciale. Il combine des résultats d’expérience, dont les échelons isolés ne viennent même plus à sa conscience et dont l’aboutissant n’est pas une pensée, mais une opération expérimentale immédiatement accomplie.

Le point le plus important du travail intellectuel qui fit découvrir la loi fondamentale de la cinétique chimique fut la création du concept convenable, celui de la vitesse de réaction : ici, il faut entendre par vitesse le rapport entre la modification de concentration et le temps qu’elle met à se produire. On dit d’ordinaire qu’il s’agit du rapport de la masse de corps transformé en temps. Mais alors, si l’on divisait un système réagissant en deux parties dans le rapport de 1 à 3, la vitesse dans la seconde partie serait triple de la vitesse dans la première, car il s’y transforme une masse triple de matière dans le même temps, et ce n’est pas naturel. Il faut donc entendre des masses relatives,