Page:Otlet - Monde - 1935.djvu/135

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ce par quoi les sociétés sont produites et se soutiennent ? On peut dire que les sociétés sont à la fois des organismes, des mécanismes, des unions d’intelligence. Assurément, ce ne sont là que des comparaisons, des analogies, mais elles ont toutes leur valeur. Moins pour ce qu’il faut expliquer peut-être que pour ce qu’il faut créer. En effet, plus nous possédons de types de structure, — par exemple l’organisation animale, la machine, une société savante, une entreprise industrielle, qui met en relation des milliers de travailleurs et des millions de capitaux, — plus notre imagination constructive a de modèles auxquels elle peut emprunter pour ses propres créations. Ceci est d’un intérêt majeur pour le problème qui nous occupe : la structure de la vie internationale.

A. Les sociétés sont des organismes. Un organisme c’est un ensemble de cellules vivantes groupées d’une certaine façon particulière, remplissant des fonctions déterminées mais travaillant toutes au profit du corps entier. Une société est un ensemble de familles groupées d’une certaine façon, remplissant des fonctions déterminées mais travaillant toutes au profit du corps social tout en recherchant leurs propres avantages. Toute individualité vivante résulte d’un complexe inouï d’éléments chimiques, physiques et psychiques. De même les sociétés réalisent une complexité infinie d’éléments de toute nature. Comme les formes les plus hautes de la vie organique individuelle, la vie sociale a deux caractères essentiels : elle est une somme de vies partielles, une combinaison d’organismes. Elle reflète une idée directrice, une tendance à l’exécution d’un plan où tout converge vers l’équilibre. On objecte qu’un organisme vivant est un continu tandis que la société ne l’est pas ; mais qui peut dire en ce moment si nous ne faisons pas partie d’un vaste organisme qui occuperait toute la terre ou presque toute. Entre les cellules de la colonie qui forme notre corps il y a, à l’échelle de grandeurs des cellules, des espaces qui sont au moins aussi grands que ceux qui séparent naturellement un homme d’un autre homme. Et pourtant il ne viendra à l’idée