Page:Otlet - Monde - 1935.djvu/336

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 310 —

bien varié ! Combien la terre est vaste en comparaison du petit bassin méditerranéen sur les rives duquel se confina pendant si longtemps la civilisation ! Combien les hommes d’autrefois paraissent faibles et craintifs même aux plus glorieuses époques du passé, en comparaison de la formidable puissance dont nous disposons aujourd’hui ! Sous l’Empire, après la première invasion gothique, ce qu’on appelait alors le monde était limité aux pays qui s’étendent du golfe Persique à la mer d’Irlande et de la Scandinavie au Sahara, ces territoires étaient partagés en deux fractions : « le monde nouveau et le monde barbare ». Successivement à leur heure d’importance apparaissent sur la scène du monde les peuples et les races de l’Asie septentrionale et méridionale, de l’Extrême-Orient, de l’Amérique et de l’Afrique aujourd’hui. Peu à peu cependant la terre se révèle aux hommes grâce à leurs efforts aventureux la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb (1492) ; la découverte de Vasco de Gama qui double le cap de Bonne-Espérance et aborde au sud de l’Inde (1498) ; celle de Magellan qui fait le tour du monde en doublant le sud de l’Amérique (1520) ; celle de Marco Polo qui traverse toute l’Asie jusqu’à Pékin (1520[1]). Bientôt toutes les nations participent à ces découvertes. En même temps les nouvelles terres deviennent la possession de ceux qui les découvrent : Portugais (côtes d’Afrique et Sumatra), Espagnols (Amérique du Sud et du Centre), Hollandais (Australie), Anglais (Australie), Français (Canada, Louisiane). Il y soixante ans, Élisée Reclus, en tête du monument qu’il élevait à la Géographie Universelle, pouvait encore dire que la Terre reste en partie une inconnue à l’homme, que la nature ou les hommes opposaient des barrières. Et il citait les deux pôles, le centre de l’Afrique, une partie du Continent australien, la Nouvelle-Guinée, les plateaux de l’intérieur de l’Asie. Aujourd’hui la terre entière est devenue le territoire où s’exerce l’activité humaine et celle-ci ne se laisse plus enserrer ni comprimer dans les limites arbitraires des frontières de chaque pays. Ce n’est pas seulement un échange de produits ou une circulation

  1. Paul Otlet indique une date erronée de plus de deux siècles, Marco Polo étant mort en 1324. (Note de Wikisource)