Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 2.djvu/115

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du cinquième siècle, a composé en l’honneur de saint Agnès : il fait une longue histoire du martyre et il la couronne par cette invocation. «  Ô vierge heureuse ! ô nouvelle gloire ! noble habitante du palais du ciel, abaissez vers notre fange votre front ceint d’une double couronne. L’éclair de votre visage favorable, s’il pénètre jusqu’à mon cœur, le purifiera. Tout devient pur là où daignent tomber vos regards, là où se pose votre pied éclatant de blancheur.

Nil non pudicum est quod pia visere
Dignaris, albo vel pede tangere[1].

Je ne sais, mais voilà une poésie qui me semble avoir retrouvé l’élan des anciens, seulement la trace qu’elle suit, c’est la trace qui mène au ciel. Ce n’est pas tout, un autre souffle, un souffle nouveau, qui vient aussi des lèvres des femmes, va pénétrer dans la poésie chrétienne et y révéler une fécondité dont les autres âges recueilleront les fruits l’amour platonique. Ce sentiment commence seulement dans Platon à se dégager des obscénités et des ignominies de l’amour grec ; au contraire, lorsque, pour la première fois, un chrétien que le souffle inspirateur a touché, écrit en prose mais dans un langage bien poétique, lorsque Hermas compose son livre étonnant du Pasteur, l’amour

  1. Prud., Peristephanon, XIV, v. 133.