Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 4.djvu/128

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ami. Florbert lui avait envoyé des vivres, et lui demandait des vers. Livin s’excuse sur la tristesse du ciel et la dureté des hommes. « J’ai vu, dit-il, un soleil sans rayons, un jour sans lumière, et des nuits sans repos. Autour de moi s’ameute un peuple impie et-qui demande mon sàng. 0 peuple, quel mal t’ai-je fait ? C’est la paix que je t’apporte : pourquoi me déclarer la guerre ? Mais ta barbarie fera mon triomphe, et me donnera la palme du martyre ; je sais en qui je me confie, et mon espoir ne sera pas trompé. Tandis que « j’écris ces vers, l’âne des provisions m’arrive,. pliant sous le fardeau ; il m’apporte tout ce qui fait les délices des champs, et-le lait, et le beurre, et les œufs les fromages pressent les joncs des paniers trop étroits. Que tardes-tu, bonne ménagère ? Hâte le pas, et rassemble tes nouvelles richesses, toi si pauvre ce matin » Et le bon évêque finit par un touchant retour sur sa jeunesse, et sur ce nom de poëte que lui donnaient ses compagnons de noviciat. « Je ne suis plus ce que je fus, « et j’ai perdu le don des vers joyeux[1]. »

  1. Mabillon, Annales, I Acta S. 0. S. B., sœc. II. Vita S. Eustasii, Vita S.Fursoei, Vita S. Livini. Concilium Meldense, ann. 845, can. 40. Valois, Notitia Galliarum, p. 442., 0’Connor, Script. Rer. Hibern., epist. nuncupat. CCXXVI. Fleury. Histoire ecclésiastique, t. VIII, livre XXXVII. Rettberg, Kirchengeschichte. t. I. Epistola S. Livini ad Florbertum Abbatem, apud Usher, Epist. Hibern. Sylloge :

    Audeo mira loqui : solem sine lumine vidi ;
    Est sine luce dies, sic sine pace quies.