Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 4.djvu/396

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drier national, en ordonnant que l’Evangile fût prêché au peuple en idiome vulgaire. Les chants barbares qui célébraient les héros du Nord faisaient sa joie ; il les savait par cœur comme les anciens scaldes ; il prit soin de les recueillir comme Pisistrate recueillit les poëmes homériques. Le ciel du Midi put le charmer, l’inspirer, mais non le retenir. Devenu empereur, il ne fixa sa résidence ni à Rome, ni à Ravenne, ni à Milan, ni dans les cités impériales des Gaules, mais à Aix-la-Chapelle, au cœur même de l’Austrasie, dans le voisinage du manoir d’Héristal, berceau de sa famille, sur cette terre batave, première conquête des Francs. C’est là qu’il fit transporter les marbres et les colonnes de Ravenne. Il voyait volontiers autour de lui ces merveilles de l’art et du luxe romain mais il voulait avoir le sol.germanique sous ses pieds. Enfin, ce vainqueur des Saxons osa moins que Childebert et Clotaire contre les institutions barbares. Il n’essaya pas de remplacer la composition pécuniaire par la peine capitale. Il ordonna de rédiger les lois des nations qui lui obéissaient il entreprit de les amender, d’y ajouter jamais de les abolir. Ne lui reprochons point d’y avoir touché d’une main timide, de n’avoir supprimé le duel judiciaire ni le jugement de Dieu. C’était la marque d’un grand esprit de savoir se contenir, même dans le bien, de savoir attendre et de laisser fermenter pendant plusieurs siècles encore