Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 4.djvu/489

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gile et aux Cicéron de Toulouse je veux dire Glengus, Galbungus, et je ne puis guère m’empêcher de prendre ce dernier pour quelque Visigoth furtivement introduit dans le sanctuaire de l’enseignement. Les Germains retrouvaient chez ces grammairiens l’usage de l’allitération, c’est-à-dire l’ornement accoutumé de leur poésie : ils y voyaient la même passion des termes obscurs et des figures téméraires, la même fidélité à ne rien nommer par son nom, les mêmes traits qui caractérisaient les chants de leurs scaldes, qui nous étonnent encore dans les fragments de l’Edda et dans l’épopée anglo-saxonne de Beowulf. Les bardes gallois du septième siècle aimaient à hérisser leurs compositions de mots latins qu’ils n’entendaient pas. Les Irlandais feront mieux, et produiront des livres entiers dans la plus ténébreuse des douze latinités. Les poëtes anglo-saxons poussent le génie de la périphrase à ce point, que l’un d’eux trouve vingt six manières de désigner l’arche du déluge. Dans la langue lyrique de ces hommes ; dont les pères offraient encore des sacrifices humains, une harpe s’appelait « le bois du plaisir » et les larmes, « l’eau du cœur. La rhétorique n’a plus de secrets pour des imaginations si bien préparées, et le dernier écolier anglais écrira aussi métaphoriquement, aussi inintelligiblement que les docteurs aquitains. Enfin, si ces maîtres habiles avaient pensé sauver la science en l’envelop-