Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 7.djvu/234

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prêter une interprétation matérialiste, de donner aux promesses divines un sens terrestre et de substituer à la communauté des sacrifices la communauté des jouissances. C’est ce que l’hérésie a fait dans tous les siècles et ce qu’il importe d’étudier, ne fût-ce que pour savoir si le socialisme, où toutes les vérités sont si anciennes, a porté du moins plus de nouveauté dans ses erreurs.

Si les premières traces des erreurs socialistes se perdent, comme on l’a vu, dans l’obscurité des théogonies païennes, il faut s’attendre à les voir reparaître chez les hérétiques des premiers siècles, héritiers du paganisme. Une comparaison soutenue ferait peut-être ressortir plus de rapports qu’on ne pense entre le panthéisme de quelques gnostiques et la cosmogonie de Fourier avec sa théorie pythagoricienne des nombres, avec les hymens qu’il célèbre entre les étoiles et les transformations fabuleuses qu’il réserve à la nature et à l’humanité. Mais c’est dans la pratique surtout que la ressemblance éclate, et que des deux côtés on voit la même révolte contre l’étroite morale de la foule, le même effort pour remplacer la tyrannie du devoir par la loi de l’attrait. Dès le temps des Pères, l’Égyptien Carpocrates avait professé la science nouvelle (gnose), la science libératrice destinée à affranchir les hommes de la domination des mauvais esprits qui font gémir le monde sous l’injustice de leurs lois. La nature elle-même, ajoutait-il, veut la