Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 7.djvu/481

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âmes si différentes que celles du roi et de son ministre n’avaient été unies d’une amitié si étroite les deux premières dignités de l’Église et de l’État confondues sur une même tête, sur une tête si chérie du prince et du peuple, semblaient promettre une réconciliation facile entre le sacerdoce et l’empire, et commencer une ère nouvelle de paix et de bonheur. Telles étaient les espérances du grand nombre.[1]

Quelques-uns, au contraire, ne trouvaient dans leurs souvenirs que des prévisions sinistres. Ils ne se rappelaient point l’enfance de Thomas Becket, et faisaient peu d’estime des prodiges dont la tradition populaire entourait son berceau: Mais ils l’avaient connu à son entrée dans la vie publique ils l’avaient connu ardent, impétueux, changeant volontiers de séjour et de condition, point ennemi du plaisir, avide surtout de renommée. Ils ignoraient l’innocence de ses mœurs, les larmes silencieuses qu’il versait quand son grand cœur étouffait sous les insignes de la richesse et du pouvoir. Mais ils l’avaient vu, lui, diacre, oint de l’huile sacrée qui fait les hommes humbles et pacifiques, déployer autour de soi une magnificence presque royale, recevoir dans son palais doré les hommages

  1. Quadrilogus, recueil formé des extraits des quatre histoires contemporaines de S. Thomas de Cantorbéry, publié par le P. Wolf et accompagné de la correspondance du saint. Voyez aussi les Annales de Baronius, tome XX ; etc.