Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 7.djvu/59

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trouvé d’abord des admirateurs, ensuite des disciples. Les ricos hombres s’évertuent à composer des sirventes et des canzons . Le Consistoire de la Gaie Science à Barcelone ouvre des concours qui rivalisent avec les jeux Floraux de Toulouse. En même temps, les Espagnols ont passé la mer ; ils reviennent de leurs conquêtes de Sicile et de Naples, l’oreille encore pleine des chants de la muse italienne, gagnés par cette passion de l’antiquité qui agitait les savants de Rome et de Florence ; deux traductions de la Divine Comédie, en catalan et en castillan, paraissent la même année (1428). D’autres imitent Pétrarque ou traduisent Tite Live. Mais la culture savante de la Provence et de l’Italie ne. pouvait s’acclimater qu’à l’ombre des palais. lui fallait la protection d’un prince bienveillant, lettré, ingénieux, plutôt que grand. Le Médicis de la renaissance castillane fut Juan II.

L’histoire a jugé ce prince, qui régna quarante huit ans et ne sut jamais régner, esclave de son favori Alvaro de Luna, puis des factieux qui lui firent signer la mort de son favori, mourant enfin avec le sentiment de sa faiblesse et de son inutilité, et se condamnant lui-même par ces dernières paroles «  Plût à Dieu que je fusse né fils d’un artisan, et que j’eusse vécu moine du couvent de l’Abrojo ! » Cependant cet homme, impuissant à gouverner les volontés, à contenir les brigues et les soulèvements, devait se faire un règne paci--