DES SAINTS INNOCENTS
Ces regards qui étaient à peine montés vers le jour et
vers le soleil du temps Pour éternellement furent clos à ces passagères, A ces périssables lumières. Ces voix, ces lèvres qui n'avaient jamais chanté les
louanges de Dieu sur terre, Qui ne s'étaient jamais ouvertes que pour demander à
téter. (Mais il me plaît ainsi, dit Dieu). Sont ainsi les seules, sont aujourd'hui les seules. Sont aussi les seules qui puissent chanter ce cantique
nouveau. Qui empti sunt de terra. Vous voyez ce que nous en
avons fait, dit Dieu. Aux Innocents les mains pleines. C'est le cas de le dire.
Ces Innocents avaient simplement ramassé dans la
bagarre Le royaume de Dieu et la vie éternelle. Qu'importe
aujourd'hui Leurs membres blancs rompus dans tous les bourgs de
Judée. Et leurs petits bras potelés coupés comme par des
hommes qui émondent. Et leurs petits doigts crispés qui se refermaient sur la
paume de la main. Et les cris renfoncés dans la gorge, les mains criminelles
les renfonçant, s'enfonçant dans la gorge comme un
bouchon. Comme un tampon. Et le jeune sang jaillissant du cœur. Qu'importent les
membres coupés. Les cuisses blanches comme de la viande de chevreau
et comme des cuisses tendres de petits cochons de lait.
325 innocents. — i3.
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