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DES SAINTS INNOCENTS

Celui-là m'est agréable, dit Dieu.

Mais celui qui fait des combinaisons, celui qui en lui- même pour demain dans sa tête

Travaille comme un mercenaire.

Travaille affreusement comme un esclave qui tourne une roue éternelle.

(Et entre nous comme un imbécile).

Eh bien celui-là ne m'est pas agréable du tout, dit Dieu.

Celui qui s'abandonne, je l'aime. Celui qui ne s'aban- donne pas, je ne l'aime pas, c'est pourtant simple.

Celui qui s'abandonne ne s'abandonne pas et il est le seul qui ne s'abandonne pas.

Celui qui ne s'abandonne pas s'abandonne et il est le seul qui s'abandonne.

Or toi, ma fille la nuit, ma flUe au grand manteau, ma fille au manteau d'argent.

Tu es la seule qui vaincs quelquefois ce rebelle et qui fais plier cette nuque dure.

C'est alors, ô Nuit, que tu viens.

Et ce que tu as fait une fois.

Tu le fais toutes les fois.

Ce que tu as fait un jour.

Tu le fais tous les jours.

Comme tu es tombée un soir.

Ainsi tu tombes tous les soirs.

Ce que tu as fait pour mon fils fait homme,

O grande Charitable tu le fais pour tous les hommes ses frères

Tu les ensevelis dans le silence et l'ombre

Et dans le salutaire oubli

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