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CHAPITRE VI

LA NOCE


Le vent bleu frisait les futaies ; de vieux arbres s’exaltaient dans les haies tapageuses ; l’horizon était plein de cimes excessives.

Cachés les villages sales, fleuries les routes maigres et raides, recouverts les champs jaunes aux vieux os de pierre ! Le Bocage était comme une immense forêt, une forêt aérée et verte d’abord, puis vite plus dense et bleue avec des traînées sombres qui étaient des lignes de sapins ; à l’horizon, des houles grises montaient, montaient, et les dernières, toutes pâles, se perdaient dans l’azur attendri, très loin.

Le vent frais troussait les ramilles ; il venait à travers des lieues de jeunesse ; il avait bu aux sources, il avait échevelé de minces cascades ; il s’était glissé dans des halliers où gouttait le soleil, et il savait les secrets innombrables des nids ; il apportait mille bruits, mille voix, mille chants : chants graves des arbres, chants futiles des eaux, chants enthousiastes des bêtes ; et il apportait la fièvre des amours exubérantes, et l’ivresse des corolles, et l’ingénuité du ciel, et la candeur du jour, et l’immense allégresse des feuilles.

On était à la fin de mai ; Delphine et Séverin