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personnage ; 3o dans Baudouin de Sebourg, il faut entendre ce vers :

Sire, che dist Gaufer, car faisons bone enfance,


« faisons bon acte de bachelier. » L’expression n’est pas juste, je l’avoue ; mais c’est la rime qui l’amène, et elle serait encore moins exacte s’il fallait adopter le sens de tradition, légende, comme le voudrait M. Génin ; 4o enfin, le Mabinogion peut en effet se traduire par Contes ou Histoires d’enfants ; mais cela ne prouve aucunement que le sens d’enfance ait été jamais confondu avec celui d’histoire.

Qui, maintenant, a tort, de M. Fauriel ou de M. Génin ? Supposez quelqu’un venant dire : « Le dernier commentateur de Racine, M. Gérusez, prétend que ce grand poëte a fait les Frères ennemis. Évidemment, M. Gérusez n’a pas lu cette tragédie dont il parle ; elle se nomme : les Frères amis. » Que penseriez-vous de cet homme ? Ce que nous devons penser de M. Génin.

Laissons l’enfance et passons à la vielle. M. Génin a vu, au commencement de la Chanson des Saxons, que le poëte s’y moquait des jongleurs dont les manteaux montraient la corde, comme on dirait aujourd’hui, et qui tiraient de mauvais sons de leurs gros instruments de musique :

Cil bastart jugleor qui vont par ces villax,
A ces grosses vieles, as despennez forriax.
Chantent de Guiteclin….


Il a conclu que c’étaient les vielles, non les jongleurs, qui avaient des fourreaux dépannés, et, tout de suite, nouvelle querelle à M. Fauriel : « Il croit (je ne sais sur quel fondement) que c’était une sorte de violon… Je pense que c’était la vielle. » (Pag. xcvii.) M. Génin pense mal. La vielle de notre temps ne fut inventée qu’au profit des jongleurs ignorants et des ménétriers aveugles ; et quand même le passage de la Chanson des Saxons pourrait s’appliquer à cet instrument, on y trouverait encore la distinction de la véritable vielle et de la grosse vielle rustique. Mais puisque M. Génin ignore le fondement de l’opinion de M. Fauriel, il me permettra de le renvoyer à Du Cange, au mot Viella ; on y cite, entre autres auteurs, Colin Muset :

Ja m’en alait el praelet
O la vielle et l’archet.