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LA FAMILLE DU PRUD’HOMME.

guère à le délivrer de toutes les douleurs de ce monde.

De sa triste famille il restait trois filles. Le démon s’occupa de les perdre à leur tour.

Le plus sûr était de les induire à suivre leurs penchants, en poursuivant tous les déduits du corps. Il y avait un jeune varlet vain, frivole et débauché ; l’Ennemi le conduisit à la sœur aînée, et tant fit le varlet et pria qu’elle s’abandonna du tout à sa volonté. La chose cependant demeurait secrète ; mais l’Ennemi, quand il a séparé quelqu’un de Dieu, n’a pas de plus grand plaisir qu’à tirer de là une occasion de scandale. On sut donc bientôt la méchante conduite de la demoiselle, et comment elle avait perdu sa virginité. Or, en ce temps-là, quand une femme était surprise en délit charnel[1], elle devait se déclarer commune à

  1. « Que on prenoit en avoutire, » dit Boron. Le mot avoutire s’entend de toute œuvre de chair hors mariage. Il est d’ailleurs probable que la peine de mort était appliquée au cas d’adultère, dans les anciennes lois barbares aussi bien que dans celle de Moïse. L’auteur de la Vie de S. Kentegern dit même que la femme non mariée, convaincue d’incontinence, était, chez les Bretons, jetée dans un précipice ; chez les Saxons, brulée vive. On ne devait pas avoir souvent recours à ces anciennes lois ; mais elles purent devenir une conséquence du système féodal, et s’appliquer rigoureusement aux femmes héritières ou tenancières de bénéfices. Comme, à défaut d’héritier direct, les fiefs devaient