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lancelot du lac.

désire le plus. — Ah ! vous en parleriez autrement si vous saviez tout ce que chevalerie exige. — Pourquoi donc ? Les chevaliers sont-ils d’autre nature que les autres hommes ? — Non, fils de roi ; mais si vous connaissiez les devoirs qui leur sont imposés, votre cœur, si hardi qu’il soit, ne pourrait se défendre de trembler. — Enfin, dame, tous les devoirs de la chevalerie ne sont pas au-dessus d’un cœur d’homme ? — Non, mais le Seigneur Dieu n’a pas fait un égal partage de la vaillance, de la prouesse et de la courtoisie. — Il faut avoir bien mauvaise idée de soi pour trembler de recevoir chevalerie : car nous devons tous viser à devenir meilleurs ; la paresse seule arrête en nous les bontés du cœur ; elles dépendent de notre volonté, et non pas les bontés du corps. »

« — Quelle est donc cette différence entre les bontés du cœur et celles du corps ?

« — Dame, il me semble que nous pouvons tous être sages, courtois et larges ; ce sont les vertus du cœur : mais nous ne pouvons nous donner la grandeur de taille, la force, la beauté, les belles couleurs du visage ; ce sont les vertus du corps. L’homme les apporte au sortir du ventre de sa mère les dons du cœur sont à qui veut fortement les avoir : tous peuvent devenir bons et preux, mais on ne le devient pas quand on écoute les conseils de l’in-