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gauvain chez helain de taningue.

mina les blessures de messire Gauvain, les couvrit d’un onguent dont elle avait la recette, et qui devait en tempérer le feu. Après souper, le valet dit à messire Gauvain : « Sire, je vous prie de me donner un conseil : je suis fort, riche et désireux de prouesse ; chacun me blâme de ne pas encore être chevalier, et la dame de Roestoc, dont ma terre dépend, m’en fait surtout de grands reproches. Or, vous saurez qu’il y a douze ans, je crus voir approcher de mon lit un grand et beau chevalier : il me tirait par le nez et je lui disais : Ah ! sire, ce n’est pas à vous grand honneur de vous en prendre à un enfant. — Ne vous souciez, répondait-il, je réparerai cela plus tard en vous armant chevalier. Je suis Gauvain, le neveu du roi Artus.

« En m’éveillant, j’allai dire à ma mère ce que j’avais songé. Elle en fut ravie, et me fit promettre de ne recevoir mon adoubement que de la main de monseigneur Gauvain. Je suis allé depuis ce temps à la cour du roi Artus plus de cinq fois, espérant y trouver son neveu ; j’y étais encore il y a trois jours ; j’appris qu’il avait entrepris la quête d’un merveilleux chevalier. Et ma dame de Roestoc, m’ayant averti qu’elle ne voulait plus attendre plus longtemps ma chevalerie, je vous prie, sire, de consentir à m’adouber : je ne pourrais l’être assurément par un plus prud’homme.