Page:Paris, Paulin - Romans de la Table Ronde, tome 3.djvu/331

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
324
lancelot du lac.

Alors la pucelle à l’épée s’approche, et délace le heaume de messire Gauvain : l’autre demoiselle commence à soupçonner qu’il pourrait bien être messire Gauvain. Car elle avait ouï dire qu’il avait une cicatrice au sourcil droit, et une des dents de moins. On lui détache ensuite la chausse droite, on lui présente sa bonne épée, et il se frappe lui-même. Le sang jaillit de la cuisse en abondance et coule dans le heaume que tendait la pucelle. — « Assez ! dit-elle ; » et elle s’éloigne avec le beau sang qu’elle a recueilli.

L’autre demoiselle achève de désarmer messire Gauvain et visite les plaies : elles étaient vives et saignantes. Comme elle venait de les découvrir, et que le patient était étendu, pâle et sans mouvement, un jeune valet entre et n’a pas plutôt jeté les yeux sur le chevalier blessé qu’il s’éloigne en poussant des cris de désespoir. On court à lui, on l’avertit de faire moins de bruit, pour ne pas réveiller le chevalier alité. Il passe dans une autre chambre d’où ses cris perçants arrivent encore au lit du malade, qui se réveille et, voulant savoir d’où part le bruit, fait un mouvement, et se voit à sa grande surprise hors du lit. C’est que, grâce au sang dont l’avait arrosé la demoiselle pendant qu’il dormait, il avait retrouvé l’usage de sa jambe. — « Mon Dieu ! serais-je guéri ? » s’écrie-t-il ; et tout joyeux, le bras en écharpe, il entre dans la cham-