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lancelot du lac.

Leurs honneurs et leurs personnes répondent de la droiture de leurs sentences. — Non, non ; le roi seul doit m’écouter et me rendre justice. Elle attendit pour sortir que l’heure des plaids fût écoulée, comme si elle eût conservé jusqu’à la fin l’espoir de voir arriver Artus. Puis, d’un air triste et courroucé, elle retourna en Carmelide où elle savait bien le trouver.

Elle se rendit, en arrivant, à la prison où il était retenu : « Roi Artus, lui dit-elle, grâce à mes fidèles chevaliers, vous êtes en mon pouvoir. Si vous refusez de me reconnaître pour votre femme épousée, au moins serez-vous forcé de me renvoyer les compagnons de la Table-Ronde que mon père m’avait accordés en dot. » Artus ne répondit rien ; il ne supposait pas encore que la demoiselle dont il était devenu le prisonnier eût pour elle le bon droit. Mais, chaque jour, la fausse Genièvre faisait glisser dans sa coupe un philtre amoureux ; chaque jour elle venait le voir, lui parlait d’une voix douce et caressante, le regardait d’un œil tendre et passionné ; si bien que, peu à peu, entraîné par la force du poison, le roi se trouva sans défense contre ses artifices. Que dirons-nous de plus ? Il en vint jusqu’à l’oubli des droits de la véritable reine, et ne passa plus guères de nuits sans reposer près de la fausse Genièvre.