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lancelot du lac.

et de saisir l’occasion que nous offre la solitude. Si vous refusez, c’est que vous renoncez à ma compagnie, et vous me donnez le droit de dire que vous êtes un recréant[1].

« — Demoiselle, vous me suivrez tant qu’il vous plaira ; mais vous n’aurez de moi rien de ce que vous demandez. Vous parlez apparemment ainsi pour m’éprouver, et je ne demande pas mieux que de continuer à vous conduire, si vous consentez à changer d’entretien. — Soit ! Je resterai avec vous et je ne parlerai plus. » Et sous sa guimpe elle laisse éclater un rire moqueur de la réserve du chevalier. Après un silence assez long, elle reprend : « Dites-moi, chevalier, est-il vrai qu’au royaume de Logres la coutume soit d’accorder à toute demoiselle le service qu’elle vient à demander ? — Assurément, demoiselle ; mais s’il n’est pas en son pouvoir de le rendre, il n’a pas à craindre d’être blâmé. — Ne pouvez-vous donc accorder ce que je réclame de vous ? — Je n’en ai le désir ni la force. — Ni la force ! Ainsi vous vous avouez battu par une demoiselle. » Ces derniers mots mettent la patience de Lancelot à une rude épreuve : « Demoiselle, dit-il, je mon-

  1. Le recréant est le champion qui s’avoue vaincu et renie ce qu’il avait soutenu avant de combattre.