Page:Parnasse de la Jeune Belgique, 1887.djvu/69

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Ceux qu’on n’a pas aimés


Ils se sont consumés à désirer la femme
En des ardeurs de saints, blancs d’espoir éperdu.
Ils ont donné leur chair, leurs muscles et leur âme
Et l’impassible Sphinx ne leur a rien rendu.

Chimères, visions à jamais en allées
Par les chemins déserts qui ne finissent pas,
Chers souvenirs pieux des âmes envolées
Dont le cœur obsédé sanglote encor tout bas ;

Printanières ardeurs, vibrantes d’allégresse,
Espoirs purs et bénis, songes inexaucés,
Ils ont en vain cherché la maison de tendresse
Qui les aurait reçus, pauvres piétons lassés.

Ils ont laissé leur rêve épuisé sur la terre
Ainsi qu’un marbre froid en un jardin flétri ;
Le sang de leur douleur aiguë et solitaire
A marqué le chemin où leur cœur s’est meurtri.