Page:Paul Leroy-Beaulieu,Le travail des femmes au XIXe siècle,1873.djvu/39

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de la bonneterie en Angleterre. L’on a inventé à Nottingham des machines circulaires marchant à la vapeur et produisant le tricot par larges pièces, dans lesquelles on taille des morceaux pour les adapter à leur destination particulière. La bonneterie est ainsi passée sous le régime de la manufacture, et des milliers d’ouvriers y consacrent leur vie dans de vastes ateliers communs. Le même mouvement est commencé en France. Nos départements de l’Aube et du Calvados, dans lesquels la bonneterie est spécialement florissante, n’ont pas, il est vrai, installé cette fabrication sur le pied où on la voit à Nottingham : c’est encore, en grande partie, un travail de chaumière ; mais déjà le métier mécanique a fait, sur quelque : points, une apparition victorieuse. Dans le Calvados, qui occupe près de dix mille femmes et enfants a cette industrie, l’on a vu s’élever plusieurs usines mues par l’eau ou par la vapeur. Or, rien n’est contagieux comme le régime manufacturier. Jamais on ne l’a vu perdre du terrain partout où il s’est établi, il a grandi au point de tout absorber.

Nous avons vu la machine soumettre à son domaine jusqu’à ces opérations délicates et compliquées, qui semblaient réservées, pour l’éternité, à l’adroite main de la femme. C’est ainsi que les tulles et les limitations de dentelles ont constitué en Angleterre une importante fabrication manufacturière. Après beaucoup de tentatives et de tâtonnements, un simple ouvrier anglais, Heathcoat, découvrit les engins et les