Page:Paul Marchot - La numération ordinale en ancien français.djvu/10

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Post-scriptum inséré pendant l’impression.

Cet article était écrit, tel que je l’ai donné, quand j’ai pris connaissance du deuxième volume de la Grammaire de M. Meyer-Lübke. L’auteur y change d’opinion (voyez § 561) et se rallie maintenant à la thèse Horning-Schwan (action exercée par disme), je me borne à la citation du passage, croyant en avoir déjà fait la réfutation dans mon article : « ... anciennement on y (dans le domaine français) trouvait autre, tierz, quart, quint, sist, sedme, dizme et, par analogie avec eux, oidme, nuefme ; oitieve n’était que subst. Mais, concurremment avec ces formes, de bonne heure déjà, il s’en présente avec -isme, en norm. -iesme Rou III 7387, wall. -eime S. S. 298, 3, dont on doit chercher le point de départ dans decimus, devenu au centre disme, au Nord-Ouest diesme, à l’Est deisme. On pourrait donc admettre que l’exemple de disme aurait d’abord fait substituer novisme à nuefme et, d’autre part, entraîné la formation de onzisme et douzisme etc. ... Il est moins facile d’expliquer le moderne -ième où l’on n’est pas autorisé à voir un emprunt pur et simple à la littérature normande. »[1]

D’autre part, en relisant la thèse de M. Gauchat sur le patois de Dompierre, j’y ai rencontré (§ 37) une troisième théorie, d’aspect passablement séduisant au premier abord, que je ne connaissais pas : « La forme commune de l’ancien français n’est pas -iesme, mais (à partir de 10) -isme. La meilleure explication en est celle qui fait devenir -ẹsimu = isimu sous l’influence d’une palatale précédente. » Précisément c’est dans la série onzimesezime qu’on trouve cette condition de la palatale ; les faits s’expliqueraient donc fort simplement. Malheureusement il faut en rabattre. Cette explication va à l’encontre d’une règle phonétique élémentaire. En effet, -ẹsimu est traité en roman comme ayant un entravé, cf. les traitements de quadr(ag)-esima (et ceux aussi de *cinqu(ag)-esima (Pentecôte), liégeois sẹkwęm, ici même, IX, 484). Or, pal. + entr. >  : cel, cest, cep, etc. Donc *undec-esimu donnerait onzesme.


Paul Marchot

  1. Une remarque seulement : -ain, -aine n’équivaut pas, comme le dit M. M.-L. quelques lignes plus haut, à -enus, -ena (des distributifs, prov. -en) : c’est -anus, -ana, on peut le démontrer par les assonances ; du reste on n’a pas -oin dans l’Est.