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sont pas seulement mannequins, sous le harnois,. toute la journée, dans les salons du grand couturier à la mode, du patron.

Lorsque l’heure de l’apéritif va sonner, elles sont contraintes, à aller faire un tour à travers Paris, en traversant les Boulevards, la rue de la Paix, non pas comme de vulgaires cocottes, mais comme des jeunes filles du monde qui rentrent chez elles, et c’est là où se font les rencontres dangereuses pour les pauvres petites.

Mais cette exhibition terminée, les forçant à rentrer au foyer paternel à huit heures du soir, quelquefois plus tard, leur anémie naturelle, exaspérée encore vers la neurasthénie par un apéritif de trop, souvent, en hiver surtout, leur calvaire n’est point encore terminé.

Il y a à Paris des quantités énormes d’étrangers, de rastaquouères, qui donnent des bals, des fêtes, des redoutes ; eh bien, ils louent des mannequins chez les grands couturiers, à un louis par tête, et le misérable en garde la moitié pour lui et donne dix francs à la pauvre fille que l’on vient chercher et ramener en voiture, en toilette de bal, de soirée, suivait le cas.

On leur fait la leçon :

— Toi, tu seras la princesse de Vénuska, tu entends, Virginie ?

— Toi, Octavie, avec tes yeux noirs, tu seras la duchesse de Sottominos.

— Quant à la grosse Mélanie, avec ses rondeurs blondes, elle sera la baronne de Van Musobec.