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travail seul ne trompe pas, comme la fortune et les procès. Dans ma tête est le patrimoine qui soutiendra frères, sœurs et neveux.

Gozzi choisit sous le toit du palais une petite chambre, où il met des livres et quelques meubles moins ruinés que les autres. Il s’installe avec plaisir dans ce cabinet d’étude et se prépare à écrire. Une voix fraîche, qui chante une chanson mélancolique, vient le distraire ; il ouvre sa fenêtre et aperçoit en face de lui une jolie femme de dix-huit ans, bien parée, coiffée avec soin, et qui travaille à sa broderie. La rue est si étroite et l’on se voit de si près, qu’il serait malhonnête de ne point se saluer.

— Pourquoi donc, dit Gozzi, chantez-vous toujours des airs lugubres et languissants ?

— C’est qu’il est dans mon tempérament d’être toujours triste, répond la dame.

— Mais cette tristesse ne s’accorde pas avec votre âge.

— Si j’étais un homme, dit la voisine avec un sourire angélique, je saurais quelles sont