Page:Peguy oeuvres completes 01.djvu/118

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voulaient, et plusieurs l’espéraient. J’étais d’accord avec eux là-dessus. Le médecin aussi le voulait. Enfin je suis assuré que tous mes adversaires le désiraient sincèrement et je crois que la plupart de mes ennemis ne le désiraient pas moins.

— Voilà beaucoup d’accords. Voulez-vous que je commence par vous ?

— Je vous dirai que je serai sans doute embarrassé pour donner réponse à vos interrogations. Je n’étais pas bien fort sur l’analyse quand j’étais malade. Il y avait en moi des sentiments et des raisons pour lesquelles je voulais guérir. Mais le désir et la volonté que j’en avais me paraissaient tellement naturels que je ne cherchais pas à en discerner les causes.

— Le devoir et le savoir ne sont pas identiquement conformes à la nature. Je vous aiderai. Nous commencerons par les raisons, parce que c’est plus commode, et nous finirons par les sentiments. Mais avant nous remarquerons que les malades veulent guérir pour échapper à la mort, ou pour échapper à la maladie, ou, naturellement, pour échapper aux deux. Nous aimons le remède, la convalescence et la guérison par amour de la vie, ou par amour de la santé, ou, bien entendu, par amour de la vie saine.

— Ce sont là, docteur, de grandes questions, et que ces simples consultations et conversations ne suffiront pas à délier : la passion de la vie et de la mort, de la maladie et de la santé, de la joie et de la douleur. Il y faudrait au moins des dialogues.

— Ou un poème. Ou des poèmes. Ou un drame. On en a fait. Beaucoup. Nous dialoguerons si la vie et l’action nous en laisse l’espace et la force, plus tard, quand