Page:Peguy oeuvres completes 04.djvu/160

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totalement, et surtout parce que nous sommes retombés à un certain équilibre, dans un certain équilibre très tentant, très solide, très commun, le même où nous nous étions arrêtés si longtemps à la montée : la France, le monde, l’histoire coupés en deux, en deux partis bien distincts, bien coupés, bien arrêtés, croyant professionnellement, officiellement, l’un à la culpabilité et l’autre à l’innocence, faisant profession de croire l’un à la culpabilité et l’autre à l’innocence. C’est la situation, c’est la position commune, usuelle, familière, pour ainsi dire classique, c’est la situation connue, le monde coupé en deux sur une question. C’est la situation commode, car c’est la situation de guerre, la situation de haine, mutuelle. C’est la situation à laquelle tout le monde est habitué. C’est donc celle qui durera, qui déjà faillit durer pendant la montée de notre courbe, qui s’est retrouvée, qui s’est reçue, qui s’est recueillie elle-même au même niveau dans la descente, qui ne se reperdra plus, qui sera définitive. Avec les amortissements successifs naturellement par la successive arrivée des nouvelles générations ; avec les amortissements croissants et l’extinction finale, l’extinction historique. Ce qu’il y a de remarquable, c’est combien cette situation, ce palier intermédiaire est commode, du pays coupé en deux, combien nous nous y sommes arrêtés complaisamment, commodément, à la montée, comment, combien nous nous y sommes retrouvés aisément, rapidement à la descente. Commodément. Combien nous nous y mouvions aisément, naturellement à la montée, en pleine bataille, combien nous y bataillions aisément, naturellement, comme chez nous, et combien nous nous y sommes même attardés. Et combien au retour, à la descente