Page:Peguy oeuvres completes 04.djvu/249

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avec notre mystique patriotique dans notre mystique dreyfusiste que ce qu’il faut bien voir, et ce que je dirai, ce que je mettrai dans mes confessions, c’est que nous ne nous placions pas moins qu’au point de vue du salut éternel de la France. Que disions-nous en effet ? Tout était contre nous, la sagesse et la loi, j’entends la sagesse humaine, la loi humaine. Ce que nous faisions était de l’ordre de la folie ou de l’ordre de la sainteté, qui ont tant de ressemblances, tant de secrets accords, pour la sagesse humaine, pour un regard humain. Nous allions, nous étions contre la sagesse, contre la loi. Contre la sagesse humaine, contre la loi humaine. Voici ce que je veux dire. Qu’est-ce que nous disions en effet. Les autres disaient : Un peuple, tout un peuple est un énorme assemblage des intérêts, des droits les plus légitimes. Les plus sacrés. Des milliers, des millions de vies en dépendent, dans le présent, dans le passé, (dans le futur), des milliers, des millions, des centaines de millions de vies, le constituent, dans le présent, dans le passé, (dans le futur), (des millions de mémoires), et par le jeu de l’histoire, par le dépôt de l’histoire la garde d’intérêts incalculables. De droits légitimes, sacrés, incalculables. Tout un peuple d’hommes, tout un peuple de familles ; tout un peuple de droits, tout un peuple d’intérêts, légitimes ; tout un peuple de vies ; toute une race ; tout un peuple de mémoires ; toute l’histoire, toute la montée, toute la poussée, tout le passé, tout le futur, toute la promesse d’un peuple et d’une race ; tout ce qui est inestimable, incalculable, d’un prix infini, parce que ça ne se fait qu’une fois, parce que ça ne s’obtient qu’une fois, parce que ça ne se recommencera jamais ; parce que c’est une réussite,