Page:Peguy oeuvres completes 04.djvu/286

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faire des armes. Je me serais si bien battu avec ces anciennes armes. C’étaient des outils d’ouvriers et même de paysans, à peine habillés, les habillements de guerre, des bêches, des pelles et des pioches, des piques et des pics, des haches et des crocs, (au bout d’un bâton ça faisait la hallebarde), des cognées, des hachettes, des marteaux, (des masses d’armes), (c’était l’homme d’armes qui était l’enclume, et c’était l’homme d’armes qui était le forgeron). (Et c’était quelquefois l’homme d’armes qui était le marteau (dans Eviradnus). Il s’agissait en effet d’entrer dans le fer comme le paysan entre dans la terre, et dans le bois, le bûcheron, comme l’ouvrier entre dans le bois et dans le fer. Ou il s’agissait d’écraser le fer comme l’ouvrier assomme, comme l’ouvrier martèle, comme l’ouvrier écrase le fer. On se forge, comme dit l’autre, et ce n’était point seulement pour les besoins de la rime :

On se forge,

On s’égorge,
Par saint George !

Par le roi !

La cuirasse et le heaume était de fer et de cuir. De part et d’autre, ouvrier, paysan, homme d’armes, la peau même était de cuir. Les armes étaient des faux emmanchées. Un ouvrier valait un homme d’armes. Un homme d’œuvre valait un homme d’armes. Un homme valait un homme. Un paysan qui prenait sa faux, un artisan qui prenait son marteau n’était pas sensiblement inférieur à l’homme d’armes qui prenait sa masse d’armes. La masse de