Page:Peguy oeuvres completes 09.djvu/56

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qu’une raison souple ou plutôt qui veut que de la raison raide soit plus de la raison que de la raison souple. C’est un préjugé qui a cours et qui fleurit sur toute la ligne. Il règne, il est indéracinable dans toutes les disciplines que nous avons échelonnées au commencement de cette note. C’est le même préjugé qui veut qu’une logique raide soit plus une logique qu’une logique souple. Et qu’une méthode scientifique raide soit plus une méthode, et plus scientifique, qu’une méthode scientifique souple. Et surtout qu’une morale raide soit plus une morale, et plus de la morale, qu’une morale souple. C’est comme si on disait que les mathématiques de la droite sont plus des mathématiques que les mathématiques de la courbe.

Il est évident au contraire que ce sont les méthodes souples, les logiques souples, le morales souples qui sont les plus sévères, étant les plus serrées. Les logiques raides sont infiniment moins sévères que les logiques souples, étant infiniment moins serrées. Les morales raides sont infiniment moins sévères que les morales souples, étant infiniment moins serrées. Une logique raide peut laisser échapper des replis de l’erreur. Une méthode raide peut laisser échapper des replis de l’ignorance. Une morale raide peut laisser échapper des replis du péché, dont une morale souple au contraire épousera, dénoncera, poursuivra les sinuosités d’échappements. C’est une logique souple, une méthode souple, une morale souple qui poursuit, qui atteint, qui dessine les sinuosités des fautes et des déficiences. C’est une morale souple qui épuise les sinuosités des défaillances. C’est dans une morale souple que tout apparaît, que tout se dénonce, que tout se poursuit. Dans un com—