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Page:Pelland - Biographie, discours, conferences, etc. de l'Hon. Honoré Mercier, 1890.djvu/44

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mon opinion personnelle, que les termes de cet arrangement me paraissent aussi équitables que judicieux. En effet, l’objet de cette clause est d’assurer à la minorité religieuse d’une province les mêmes droits et privilèges, et la même protection dont jouit la minorité d’une autre province. La minorité catholique romaine du Haut-Canada, la minorité protestante du Bas-Canada et la minorité catholique des Provinces Maritimes seront ainsi placées sur un pied de complète égalité. Mais dans le cas de quelque injustice commise par la majorité d’une législature locale, la minorité aura un droit d’appel au gouverneur-général en conseil, et pourra réclamer du gouvernement central l’application des lois correctives qui pourraient être nécessaires.»

Voilà, M. l’Orateur, le sens large et libéral que Lord Carnarvon donnait en 1867 à cette clause 98 ; et, en parlant ainsi, il devait être l’interprète fidèle, non seulement de sa pensée et de ses sentiments, mais même, mais surtout de ceux des délégués des diverses provinces qui l’entouraient. Cette unanimité de vues sur cette question, chez nos hommes d’Etat canadiens, dans le Parlement colonial, et chez les hommes d’Etat anglais, dans le Parlement impérial, était-elle le résultat d’une conviction honnête et sincère, ou celui d’une entente faite et calculée dans le but de tromper les minorités et de leur tendre un piège ?

Je ne puis soupçonner une telle infamie chez Lord Carnarvon, car je dois le croire aujourd’hui encore de la même opinion qu’en 1867 ; en Angleterre, les hommes publics se respectent assez pour ne pas modifier leurs vues suivant les besoins du moment et l’intérêt d’un parti. Mais quant à l’honorable Ministre des Travaux Publics, je n’ai aucune objection à penser, — et son langage de ce soir m’autorise à penser, — qu’il voulait surprendre la bonne foi des minorités dont il s’était fait officieusement le défenseur, et qu’il a réussi à tromper d’une manière aussi grossière. Quelle différence, quelle triste différence entre les paroles du noble lord anglais qui ne craint pas de défendre dans un Parlement protestant les intérêts des catholiques, et celles du ministre des Travaux Publics, qui dans un Parlement ou soixante députés catholiques l’entourent, n’a pas eu le courage de défendre ses co-religionnaires, mais à cédé lâchement devant la majorité.