Page:Pelletan - La Semaine de Mai.djvu/246

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» Sans croire absolument aux paroles du fédéré, — on ne croit pas à ces choses tout d’un coup, — je pressentais un danger et, voulant obliger mon mari à s’en aller, j’intervins et dis, en lui montrant à la dérobée la porte ouverte :

» — Oui, c’est ce misérable qui m’a arrêtée, mais moi ou les miens le retrouverons un jour.

» Mon mari, sans faire attention à mes signes, répondit :

» — Cette femme est ma femme. Je viens pour…

» L’officier lui coupa la parole :

» — Ah ! vous êtes le mari ! Fort bien ! classez monsieur, classez madame.

» Ou nous sépara et je me trouvai près de mon premier interlocuteur.

» — Eh bien, fit-il. Je vous l’avais dit : vous voilà condamnés !

» — Quoi ! ces mots ?…

» — Classez monsieur, classez madame, c’était votre arrêt de mort. Oui.

» Le souvenir de mes enfants me traversa le cœur. Je dus pâlir. L’homme s’en aperçut. Il me prit la main ; devinant ma pensée, il me demanda :

» — Combien en avez-vous ?

» — Cinq.

» — Tonnerre ! fit l’homme. Vous a-t-on prise les armes à la main ?

» — Non, mon mari s’est battu contre les Prussiens, jamais contre des Français ; il n’était pas comme moi pour la Commune.

» — Alors ! s’écria le fédéré, on n’a pas le droit de vous tuer.

» Il croyait à la justice, aussi, ce révolté qui allait