Page:Pelletan - La Semaine de Mai.djvu/419

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les droits de Paris, seraient poursuivis. Il faut le dire, la République y aurait péri, sans le bon sens et la fermeté des départements ; elle fut sauvée par eux, aux élections du 2 juillet. Et comment cela ? Par le succès de ces radicaux, qu’on dénonçait aux agents de la répression ; par le succès de ces conciliateurs, que M. Dufaure avait déclarés aussi coupables que les insurgés. Si le suffrage universel avait suivi, au lieu de le contrarier, le courant de la victoire, la Restauration était faite.

Monarchiste par ses tendances, le massacre le fut plus encore par ses origines. Il y faut faire deux parts : les instructions données, l’exécution. Les premières appartiennent à M. Thiers ; elles sont de l’école de 1830. Je relisais à ce propos, dans l’Histoire de Dix ans, les répressions de Paris et de Lyon en 1834 : l’analogie est frappante ; on reconnaît le même metteur en scène, le même « scenario ». Cela est si saisissant que notre éminent confrère, M. Spuller, qui publie en ce moment un panégyrique de M. Thiers très développé, n’a pu s’empêcher d’en faire la remarque. Au fond du massacre de Paris, il y avait la tradition de la rue Transnonain.

Mais, s’il n’y avait eu que cette tradition, le massacre serait resté médiocre. L’école bourgeoise de 1830 est moyenne en toutes choses ; pour « faire grand », dans ce genre, il faut les hommes du 2 décembre. Et, en effet, c’est au coup d’État que le massacre se rattache, et par l’horreur brutale des actes, et par la personne des acteurs. Tout le monde en a fait la remarque, jusque dans la presse conservatrice anglaise (voir notamment le Standard de 1871). — La boucherie de Mai ne pouvait arriver sans préparation : elle reste dans le siècle un monstrueux anachronisme, et c’est un anachronisme aussi que le guet-apens à la Borgia d’où